Vous êtes ici :   Accueil » Blog » Langue

Blog - Langue

 5 membres
Connectés : ( personne )

Ovation debout  -  par JulienConstant

Standing ovation

Connaissez-vous l'expression "ovation debout" ? On aura beaucoup écouter les médias ou lire, on n'aura droit qu'à "standing ovation" ?   

Poser ces questions, c'est voir instantanément à l'œuvre la dictature des médias de masse. Oui, on n'entend et ne lit quasiment que la version anglaise....  Inconsciemment, il y a sans doute du plaisir à se sentir intégré à un siècle anglomane, comme nous, adolescents, nous rassurions dans la reconnaissance par autrui grâce à une métalangue de groupe.

Dans ce cas précis, à part la syntaxe inversée des deux langues, l'identité est parfaite. Seul le mimétisme social, servile et inconscient, explique l'usage de la version anglaise. Notons que comme toujours, l'image sonore devient celle de la phonologie française, produisant catastrophiquement "Star warz" ou Spiderman" alors qu'un français sait parfaitement dire  "Star worz"  /stɑːwɔːrz/   et  "spaÏdermane".  /spaɪdəmæn/  .

On entend souvent que c'est mieux en anglais car ça sonne mieux (alors prononçons correctement !), qu'on aime ou pas le son de tel ou tel mot. Il s'agit de la sempiternelle discussion qui prend la beauté comme critère. Il faudrait d'abord définir la beauté, ne faudrait-il pas ? Or personne n'y est jamais parvenu... 

 Et il en va de même pour toutes les langues. La beauté n'est pas une notion nationale.

La simple vérité c'est qu'on "aime" ce qui nous est copieusement rabâché. Bref, le lavage de cerveau médiatique produit cet effet là. Mais on peut aussi avoir des préférences et des aversions subjectives, qui tiennent à notre culture, nos goûts,, notre enfance, nos rencontres, nos lectures, bref notre histoire.

Mais, objectivement, scientifiquement diraient les technoprêtres qui nous gouvernent, rien ne sonne jamais mieux qu'autre chose.  Le seul critère objectif, c'est notre penchant naturel à économiser notre énergie : les formes élidées, contractées ne sont rien d'autre que l'extrémité de l'instinct de conservation de l'espèce. Et si j'aime la musique de l'italien et de l'espagnol, si je me suis habitué à celle de l'allemand au point de l'apprécier, si je ne parviens pas à aimer l'image sonore de l'arabe, cela ne change rien au fait que les langues sont toutes également belles.

Quelle que soit la langue, aimer ou pas, c'est soit lié à l'habitude du matraquage (mes proches ne savent dire que "mail", rabâché par Tv et radio, et mon 'courriel' les irrite)  Ils disent 'SMS', (alors que mes amis anglais simply send me texts or text me...)   ou à l'histoire personnelle

Ou alors, on entend : "C'est plus court en anglais !" dans la bouche de personnes qui ne disent pas :"Qu'est-ce ?", mais "Qu'est-ce que c'est ?" ou bien qui disent :" Qu'est-ce que tu veux ?" et non : "Que veux-tu ?".  Car s'exprimer, c'est aussi occuper l'espace sonore, se donner le temps de penser, et pour certains euh, c'est euh laborieux... La durée des éléments de messages dépend aussi de l'investissement, de la compétence, de la forme de l'énonciateur, de ceux qui écoutent, de leur statut social, des circonstances...  Et que dire de la tournure bien trop utilisée, notamment par nos chères élites, "il y a... qui..." ? ("Il y a des centaines de gilets jaunes qui convergent vers Paris",  au lieu de "des centaines de gilets jaunes convergent Paris".

On voit bien que l'argument éculé "c'est plus court", tourne...court...

Car tant que la langue est vivante, elle change au fil des erreurs massivement ré-employées, au fil des apports externes et de la création morphologique, lexicale, syntaxique...  Mais c'est bien plus que cela : nous ne parlons jamais seuls ; même face à mon clavier ou stylo en main, l'interlocution est toujours à l'œuvre ; mon discours est certes produit mystérieusement par mon cerveau (morphogenèse - G. Guillaume), mais les messages extérieurs, orientent, influencent, modifient ma parole : chant des oiseaux, bruits de moteurs, expression des visages, couleur du ciel, odeurs, vibrations, tout le champ de la perception concourt  aussi à la production de mes phrases.

Reste que l'influence majeure est celle qui déclenche notre mimétisme naturel : tout ce qui est rabâché (matraqué) s'imprime dans notre mémoire à notre insu (principe essentiel de l'enseignement et de l'éducation). Sans lutte consciente, notre pensée, dans la production même de nos idées, faites exclusivement de mots, notre pensée donc est façonnée, subrepticement, et c'est ainsi que la Pensée Unique, dont personne, y compris moi, n'est à l'abri, uniformise le troupeau de moutons que nous sommes. Elle est pas bêle la vie ?

Mais de tous les anglicismes, les plus ridicules restent quand même les traductions littérales, transpositions directes, ou seules la syntaxe et la prononciation changent... Là il faudrait bien aller jusqu'à avouer qu'on déteste le français... ou qu'on n'ose plus le parler, pour ne pas se faire remarquer, ou tout bêtement qu'on préfère suivre le troupeau, la servitude, c'est moins fatigant....   Donc, s'il vous plaît, offrons une ovation debout à la liberté.

Exemple de syntaxe de l'anglais dans un énoncé français par la MAIF, assurément militante débilitante :

MAIF_Numérique_ tour.jpg

Publié le 06/05/2019 16:25   | |    |


Commentaires

Personne n'a encore laissé de commentaire.
Soyez donc le premier !